Grâce notamment à son programme de recherche BRIO (Bordeaux Recherche Intégrée en Oncologie), la recherche sur le cancer constitue l’un des pôles d’excellence de l’Université de Bordeaux. Ainsi, BRIO a été labellisé en 2012 comme l’un des huit SIRIC (sites de recherche intégrée en cancérologie) français dans le contexte du Plan Cancer 2. Cette labellisation a été reconduite en 2017 pour une nouvelle période de cinq ans. Rattaché à des hôpitaux bordelais, le CHU de Bordeaux et l’Institut Bergonié, BRIO est dirigé par le Professeur Soubeyran. Grâce à sa réputation et son savoir-faire, BRIO fédère plusieurs autres unités de recherche en oncologie de Bordeaux et a vocation à développer ses thématiques dans le cadre de projets européens. Le projet européen collaboratif GERONTE s’inscrit donc parfaitement dans cette démarche.

Sous la coordination de l’Université de Bordeaux, GERONTE fédère en son sein dix structures européennes dans les domaines de la médecine, de la santé publique et de la transformation numérique. A travers des outils innovants, un modèle de prise en charge pluridisciplinaire du cancer chez les personnes âgées, tenant compte de leurs comorbidités et de leurs fragilités, est construit et va être testé dans le cadre de larges essais cliniques. Ce dispositif vise notamment à inclure tous les professionnels de santé en lien avec le patient, qu’ils soient hospitaliers ou en médecine de ville, dans le processus décisionnel concernant le dernier. La conséquence est une prise en charge plus complète et adaptée ainsi qu’une baisse des coûts liés au traitement.

Le Professeur Soubeyran témoigne de la coordination de GERONTE par l’Université de Bordeaux.

Comment êtes-vous rentré dans la dynamique du projet et qu’est-ce qui vous a motivé à en devenir le coordinateur ?

L’appel à projets dans le cadre duquel GERONTE était doté d’un financement conséquent (subvention UE : 5 998 759 €). Avoir un financement important et solide était la condition sine qua non pour la faisabilité du projet. Au-delà du financement, deux autres arguments majeurs nous ont poussés à prendre la coordination. Premièrement, l’appel à projets européen visait un sujet, la multimorbidité chez le patient âgé (avoir au moins deux maladies simultanées), qui nous intéresse beaucoup. De plus, il nous est apparu possible de mettre au point, grâce au caractère collaboratif et européen du projet, un dispositif adapté non seulement aux spécificités françaises mais également à celles d’autres pays. Notre ambition de coordination était donc posée dès le départ. Deuxièmement, la labellisation SIRIC nous confère une réputation nationale et internationale qui nous permet de réunir au niveau européen les compétences nécessaires pour gérer un tel projet.

Quels engagements supplémentaires prend-on en tant que coordinateur ?

Quand on est coordinateur, il faut être bien entouré, notamment d’un chef de projet européen compétent. Ce dernier doit être capable de gérer des projets complexes intégrant une multitude de partenaires et le/la confrontant à des sujets tels que la gestion d’un site internet ou le respect de la RGPD. Le rôle du coordinateur réside surtout dans l’animation du groupe projet qui nécessite une bonne diffusion de la philosophie générale du projet. Être coordinateur d’un projet européen nécessite d’y investir beaucoup de temps. C’est un peu sans limite. Il faut notamment être au courant de tous les lots de travail, même si on n’y est pas forcément directement impliqué.

Comment évaluez-vous les différences entre les dix systèmes de santé étudiés dans GERONTE ? En quoi l’approche GERONTE se distingue de la prise en charge actuelle ?

En dépit des différences entre les systèmes de santé européens, il y a des points communs mais pas toujours positifs. L’Europe a une population de plus en plus vieillissante et ces patients sont de plus en plus complexes à gérer avec des systèmes de santé souvent peu adaptés à ces nouvelles situations. Aujourd’hui, la prise en charge du patient est partout opérée par des spécialistes, maladie par maladie, et c’est justement cela que GERONTE tend à changer. Nous avons basé notre approche sur les résultats de projets européens antérieurs et souhaitons valider notre système de prise en charge dans le cadre d’essais européens en confrontant l’approche GERONTE aux systèmes actuels belges, néerlandais et français. Notre approche du projet est multidisciplinaire et place le patient au centre de la décision et non la maladie. Cependant, ce sera toujours le spécialiste de la maladie dominante qui assurera le suivi du patient avec une possibilité d’évolution au fil du temps selon le tableau clinique du patient. Le pivot dans toute cette approche est l’infirmier de pratiques avancées qui assurera un contact direct avec le patient et sera le pivot de la prise en charge avec les professionnels de santé impliqués dans la prise en charge du patient. La centralisation et l’accessibilité des données du patient est le deuxième grand axe de GERONTE. Grâce aux outils numériques, celles-ci peuvent être mieux reparties et être accessibles et utiles à tous ceux impliqués dans le processus décisionnel concernant le patient.

Quelles retombées concrètes attendez-vous pour la Nouvelle-Aquitaine ? Y aura-t-il des interactions avec le Gérontopôle Nouvelle-Aquitaine à la suite du projet GERONTE ?

La Nouvelle-Aquitaine est la première région de France en matière de taille mais uniquement la quatrième en matière de population. Ici, nous sommes notamment confrontés à des problèmes d’isolement et d’accès aux soins similaires au Québec. Aujourd’hui, il y a des liens avec le Gérontopôle Nouvelle-Aquitaine mais ceux-ci ne sont pas fonctionnels. Le défi sera donc de les développer car Limoges et Bordeaux sont historiquement des centres d’excellence en matière de télésurveillance.

Pour en savoir plus :  https://geronteproject.eu/

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